Florent Barret

Alice est une marionnette. Dépendante de ses manipulateur.ice.s, elle ne peut quitter ce petit espace qui lui sert d’appartement.

Sa solution pour être vue et entendue, c’est de streamer dans sa chambre. Elle doit être remarquée, trouver sans cesse de nouveaux divertissements. Elle doit aller dans le sens de son public, car si ce dernier se désintéresse d’elle, elle sera seule et redeviendra objet inanimé.

« Dans mon cocon » met en scène nos luttes dans le monde virtuel pour plaire aux autres, se sentir aimé, se sentir exister.

J’ai grandi en même temps que la démocratisation d’internet, des jeux vidéos, et des

réseaux sociaux. Si nos parents s’inquiétaient de nous voir passer de plus en plus de

temps devant des écrans, nous nous réjouissions d’avoir de nouveaux moyens de

rester connecté.e.s avec nos proches, nos camarades de classe et de nous évader

dans d’autres univers.

Aujourd’hui, mon regard se trouve plus nuancé en ce qui concerne notre rapport aux

écrans et aux plateformes.

Il est désormais possible de s’enfermer des mois entiers dans un appartement et

n’avoir de liens sociaux que par écrans. Au Japon, les personnes ayant fait ce choix de

vie sont parfois appelées les « Hikikomoris », des individus souhaitant s’isoler de la

société. Leur nombre est difficile à estimer. De la même façon, on ne saurait estimer le

nombre de personnes atteintes de solitude aujourd’hui, ni même en mesurer

pleinement les conséquences.

Alors, le virtuel joue-t-il un rôle dans l’isolement et la solitude ? Ou amène-t-il au

contraire la possibilité de voyages, de rêveries et de rencontres ? La réponse semble

évidente . . . Un peu des deux . . . Cela dépend . . .

Je constate surtout qu’il nous sera impossible de revenir en arrière. Les mondes et

interactions virtuelles se multiplient chaque année. D’où mon envie de faire un

constat, un état des lieux de la place des outils numériques et virtuels dans nos vies,

en montrant le parcours d’un personnage ayant construit sa vie autour de cela.

Il sera question par moments de pointer du doigt certaines problématiques, comme

le cyber-harcèlement, l’hyper sexualisation, le burn-out . . . Parler de solitude et de

distance face à un public, dans le même espace et au même instant. Mais je veux

aussi proposer un regard teinté d’humour et de poésie, dans une esthétique par

moments onirique, éloignée du réel. C’est à cet endroit que le théâtre et la marionnette ont à mon sens un rôle à jouer.